Au début était l’architecture, pour trouver sa place, questionner son être-au-monde. Mes études et ma pratique d’architecte ont aiguisé mon goût pour les structures et l’espace. Ma création est ainsi traversée par ces notions, sans oublier la philoso- phie, notamment la phénoménologie. Mon travail constitue une tentative d’associer les règnes minéral, végétal et animal en un tout cohérent, en vue d’un ordonnancement du cosmos, dans un souci d’ancrage. D’où mon intérêt pour les premières perspectives balbutiantes, de l’Antiquité à la Renaissance. Traduire l’enchevêtrement du monde par un agencement de couleurs, de formes et de structures. Par prolifération, dissémination ou tissage, ce processus créatif vise la représentation de ma cosmogonie. Parmi mes sources d’inspiration, j’en distingue deux types : les références artistiques – littérature, surréalisme et dadaïsme, expressionnisme abstrait, Arte povera, art contemporain – et le réel – environnement urbain ou industriel, images et objets divers. Ces fragments du quotidien, je les nomme mes « déclencheurs » car ils appellent d’autres formes, souvent du dessin automatique et le télescopage de motifs variés. Long- temps médium privilégié, la gravure a fait place au dessin. Je peins à l’acrylique sur papier ou carton – format raisin max. – et utilise des techniques mixtes, crayons, craies et encre. Parfois d’après esquisse, la composition se fait surtout au fil du trait, avec priorité à l’improvisation. Je représente souvent des symboles, des fragments de formes réelles pour éveiller une projection, une hypothèse, une ressemblance. La suggestion comme tremplin à l’imaginaire. Créer, c’est aussi pour moi restituer cet « élan vital » cher à Henri Berg- son, ce fourmillement de la matière. Traduire cette sensation qu’une vie anime tout ce qui gît ; mon étonnement face à la simple présence, au silence et à l’immobilité. D’où ma fascination pour les masses inertes, non- lieux, monticules ou jardins japonais.
